Albert Renger-Patzsch — Les Choses
Exposition au Jeu de Paume du 17 octobre 2017 au 21 janvier 2018
Commissaire d’exposition : Sérgio Mah
une remarquable exposition qui présente le travail de Renger-Patzsch (1897-1966) au cœur de la « Nouvelle Objectivité », dans l’Europe des années 1920 qui bouscula la vision photographique en donnant une direction totalement moderne et novatrice par son esthétique et ses significations.
Il s’agit de se servir des caractéristiques techniques de l’outil photographique. L’image est construite, précise, les formes sont nettes, mises en avant. L’idée n’est pas de reproduire la peinture, mais bien de faire de la photographie un art à part entière avec ses spécificités propres.
De la même manière, l’exposition est construite suivant un schéma thématique, mais aussi chronologique. En effet, chaque période de la vie de Renger-Patzsch marque un nouveau sujet d’étude : les fleurs, la ville, les paysages, l’industrie, la nature, sont autant de thématiques différentes qui se recoupent en un seul et même thème : Les Choses.
L’exposition s’ouvre ainsi sur ses photographies de fleurs, et d’orchidées notamment. Avec des cadrages resserrés et une précision presque chirurgicale, les formes de la natures sont cataloguées, avec leurs appellations scientifique ; on retrouve d’ailleurs cette obsession des formes naturelles dans le travail d’un autre photographe allemand de l’époque, Karl Blossfeldt.
En 1928, Renger-Patzsch publie Die Welt ist schön, « Le Monde est beau », livre qui réunit plantes, hommes, architectures, nature et objets manufacturés, tel un catalogue formel des choses qui font notre monde.
La scénographie de l’exposition, la place choisie d’une photographie à côté d’une autre, témoignent de cette volonté d’objectivité et de neutralité. Ainsi, on peut remarquer des similitudes dans la forme entre une forêt en hiver et une série de fers à repasser.
Si les formes de la nature occupent une grande partie du travail de Renger-Patzsch, les formes plus contemporaines, manufacturés, ont tout autant passionné le photographe, que ce soit à travers les objets comme à travers l’architecture industrielle. En effet, quand en 1929 il s’installe dans la région de la Ruhr, où l’industrie est au centre des activités humaines et des paysages, Renger-Patzcsh concentre son regard sur cette industrie foisonnante.
A cette période de sa vie, Renger-Patzch est reconnu, il répond à des commandes publicitaires qui accompagnent l’avènement des produits manufacturés. Une grande partie de ses archives est alors conservée au Museum Folkwang, mais en 1944, la guerre et les bombardements détruisent ce fond d’archive, et obligent Renger-Patzch et sa famille à partir. Il entame à ce moment-là son dernier travail, axée sur la nature, les paysages qu’elle forme, les textures qui la composent notamment au travers de la roche.
Des citations de Renger-Patzsch ponctuent la visite, et montre ainsi la réflexion qui a accompagné son travail tout au long de sa vie. En voici quelques-unes qui montrent bien l’importance de l’outil photographique et de ses caractéristiques pour le photographe :
« […] Le photographe doit devenir pleinement conscient de la splendide fidélité de reproduction grâce aux possibilités de sa technique. » 1928.
« [L’oeil] est subjectif ; il a plaisir à regarder les choses essentielles et délaisse complètement le superflu.
L’appareil photographique, lui, a la charge de reproduire la totalité de l’image, avec netteté et dans le format requis. Il ne différencie pas l’essentiel de l’accessoire. » 1937